La Quatrième Case, essai, Archipel Essais, 2022
Lorsqu’un roman est narré au nous sans aucun je auquel le rattacher, qui raconte vraiment ? Doit-on imputer la narration à un hypothétique narrateur anonyme, ou supposer l’existence d’un sujet collectif d’énonciation ? À l’image de l’ambiguïté référentielle propre au pronom, les situations narratives qui y ont recours de façon systématique appellent peut-être plusieurs lectures, selon la perspective que l’on choisira d’adopter.
À partir de la description d’une forme marginale, La Quatrième Case souhaite mettre en tension les modèles narratologiques disponibles en reposant cette question fondamentale de la poétique: au fond, qui parle (s’il faut que quelqu’un parle), lorsqu’un texte dit nous ?
L’Œil de l’espadon, roman, éditions Zoé, 2015
À 24 ans, Charlie est apprenti-poissonnier au Grand Magasin. Son quotidien a l’aspect moiré des écailles: découpage, évidage, emballage et autres savantes manipulations de la marchandise, nettoyage méticuleux des tables de travail, et puis visites au grand frigo et à la gigantesque poubelle, café et cigarette des pauses avec ses collègues, enfin les clients, les anonymes et les habitués, les affreux et les charmants. Mais Charlie ne veut plus de l’image que lui renvoient Natacha, son patron et les clients : celle d’un gentil, tellement gentil jeune homme. De son côté Emile, grand idéaliste, se trouve confronté, grâce à Charlie, à une réalité plus subtile qu’il ne la voudrait. Non, tous les employés du Grand Magasin ne sont pas des imbéciles englués dans la routine. et en russe
Disponible en version Poche
Également disponible en russe, en allemand, et en italien
Ciao Letizia, récit, aux éditions Encre fraîche, 2012
“Sans un mot, elle monte à l’étage. Lorsqu’elle revient, elle a une énorme paire de ciseaux dans la main droite, un baquet dans la main gauche. Letizia, terrifiée, ne fait pas un geste. La mère saisit une mèche des si longs cheveux de sa fille. Elle ouvre les ciseaux, et, délicatement, à quelques millimètres à peine du crâne, elle la coupe. La petite fille sent le métal froid contre sa tête. Les cheveux tombent dans la main de la mère. Elle les enroule et les laisse tomber dans le baquet, à ses pieds. Elle continue. Une deuxième mèche, une troisième. Letizia reste immobile, les yeux fixés sur le sol, sur le carrelage brillant, où elle voit le reflet flou de son visage perdre ses cheveux. Elle se voit devenir chauve comme la mort. Au même endroit, comme l’autre fois, avec le père, dans le fond de la cuisine. Et comme l’autre fois, elle ne se défend pas. Le lendemain, Marie va vendre le tas de cheveux qu’elle a récupéré. Ils sont très beaux, en assez bon état, et si longs qu’elle en tire une belle somme, grâce à laquelle, comme elle l’a prévu, toute la famille peut manger pendant des semaines.”